L’écrivain franco-algérien Kamel Daoud, couronné du prestigieux Goncourt 2024 pour son roman Houris, se trouve au cœur d’une vive controverse. Peu après le triomphe du roman, Saâda Arbane, une Algérienne résidant près d’Oran, a accusé l’auteur d’avoir détourné son histoire personnelle, avec la complicité de son épouse, psychiatre.
Dans une interview accordée à la chaîne privée algérienne One TV, Saâda Arbane affirme que l’intrigue de _Houris_ s’inspire directement de son propre vécu par les traumatismes de la guerre civile algérienne en 1990. Selon elle, Kamel Daoud et son épouse lui auraient demandé à plusieurs reprises la permission de raconter son histoire dans un roman, une proposition qu’elle dit avoir catégoriquement refusée. Ces accusations, particulièrement graves, incluent alors une violation présumée du secret médical, mettant en cause la psychiatre, qui aurait partagé des informations confidentielles avec son mari écrivain.
Face à ces allégations, Kamel Daoud a réagi dans une tribune publiée dans l’hebdomadaire Le Point, après un temps de silence. L’écrivain dément fermement ces accusations et dénonce des affirmations « totalement fausses ». Il insiste sur le fait que _Houris_ ne partage aucun point commun avec le vécu de Saâda Arbane, si ce n’est le thème universel de la douleur d’un pays marqué par des décennies de violence. Selon Daoud, l’œuvre s’inscrit dans une réflexion plus vaste sur la guerre civile algérienne et les blessures collectives qu’elle a laissées.
Daoud se montre également critique envers son accusatrice, qu’il estime manipulée dans un contexte politique tendu. Il va jusqu’à dénoncer une stratégie de diversion orchestrée par la dictature algérienne pour détourner l’attention des véritables responsables des tragédies du pays. « Le paradoxe étant ici qu’une femme n’accuse pas ses bourreaux, mais un écrivain », déclare-t-il avec amertume.
L’éditeur Gallimard avait déjà dénoncé des attaques « diffamatoires » à l’encontre de l’auteur. Soulignons que _Houris_ est frappé d’interdiction en Algérie, et qu’il n’a pas pu participer au Salon du livre d’Alger en novembre dernier.
Le prix Goncourt a consacré l’engagement de Kamel Daoud à briser le silence sur les pages sombres de l’histoire algérienne, mais ce triomphe littéraire pourrait-il être terni par cette affaire ? Un enjeu considérable pour l’écrivain ainsi que pour la maison d’édition.