Récent lauréat du Prix littéraire Jean Metellus, Smeev Jerry signera son deuxième recueil de poèmes « J’ai un cimetière dans la bouche », ce 18 Novembre. Avant de recevoir son prix, le jeune auteur apoosera son autographe sur cette pépite qui lui a valu une mention spéciale lors de la première édition. Entretien avec le poète.
On aurait pu dire que les exploits sont de l’ordre des choses ordinaires pour Smeev Jerry. Si sur le site officiel du Prix littéraire Jean Metellus on le surnomme « Leo Messi » il le doit à sa mention spéciale de l’édition 2023 avant de remporter haut la main l’édition 2024 pour son recueil inédit « Les oraisons du vide ». Autrement dit, par la force d’une plume singulière. Alors que son trophée l’attend sagement, Smeev a prévu de signer « J’ai un cimetière dans la bouche » ce 18 Novembre 2024 à la Bibliothèque Municipale de Mirebalais.
Ayant vu le jour un dimanche matin à Mirebalais, celui qui a forcé les barrières par l’entremise de sa plume ciselée contre ou pour les lots s’étonne encore qu’on le dit poète. « J’ai fini par l’accepter et essaie de faire honneur à ce titre » avoue t-il. Son premier recueil « Latranblad » est né du ventre de Ram éditions, alors que « J’ai un cimetière dans la bouche » est publié chez Recto Verso, tout comme Les oraisons du vide.
Piégé, comme tout auteur, dans le doux tourbillon des mots, il est choisi par les thèmes qu’il traite lui-même. « Je suis comme tout homme qui constate et de mes constats sont nées quasiment toutes mes œuvres. J’écris mon île, le sang, la mort, la fuite et l’amour. L’amour c’est surtout pour adoucir les choses; penser à quelqu’un qu’on aime avec une arme braquée sur la tête donne sûrement l’impression d’être immortel » explique le poète.
Le jeune homme de 25 ans voie un culte particulier à son nouveau né. Il nous apprend qu’il marche de pair avec l’ouvrage qui le suit. « J’ai un cimetière dans la bouche découle de tout ce que j’ai énoncé avant, d’ailleurs le livre qui le succède est un peu une suite du cri que je n’ai pas su y introduire. C’est un livre jonché de cadavres et de quelques grains d’espoir ».
Le poète n’est pas en mal d’adresse dans ce nouveau recueil. Enfant d’une catastrophe ambulante, le Mirebalaisien sait qui pointer et de qui attendre le vent nouveau. « Le message est une invitation surtout aux élites de ce pays à le repenser. Et mes lecteurs verront combien nous nous ressemblons, combien nous sommes les mêmes fruits amers issus de la même branche. Une invitation à dire qu’il n’est plus le moment à compter des morts mais à redonner à cette terre son éclat » débite Smeev Jerry.
Ne pas s’endormir sur le livre qu’on veut faire, c’est peut-être la leçon que nous apprend l’écrivain. « Quand l’idée de rédiger un livre me vient, je me mets aussitôt à l’écrire. Il n’y a que sa fin qui peut me le sortir sous la coude. Il n’y avait que le temps qui me faisait défaut car je voulais faire vite » ainsi raconte t-il le processus de création de ce recueil.
À la question de savoir pourquoi il a choisi le titre J’ai un cimetière dans la bouche, Smeev répond avec poésie : « Je l’ai dit dans un poème : « À trop citer des noms de morts/ Chaque dent devient tombeau ». Autant que le cœur, la bouche est sûrement l’endroit que squattent le plus ceux qui ne sont plus là. Nous citons tellement les noms de nos proches disparus qu’on a l’impression qu’ils habitent notre parler. Nous avons donc chacun notre cimetière dans la bouche. »
Le poète voit son recueil comme une œuvre universelle et poignante. « Parce que c’est un recueil qui incite la foule à se donner, à œuvrer pour un meilleur demain. Mais aussi parce que c’est le portrait de tout le monde : de l’éboueur qui sent le déchet à l’homme politique qui hume l’encens. Lire ce livre c’est se lire, c’est apprendre à se donner la main soi-même. »
Smeev ne cache pas sa fierté d’avoir reçu une mention spéciale au Prix Jean Métellus. Bien que cette année, il en est le grand vainqueur. « Ce n’est pas rien le Prix Jean Métellus, et recevoir une mention spéciale, c’est comme recevoir une attestation de son don, une confirmation de l’excellence de son livre. C’est ce qui m’a incité à chercher où le publier d’ailleurs. »
Avec une plume vibrante et sensible, Smeev Jerry continue de prouver et de se prouver que « le poème mène quelque part », comme il le martèle si bien. Ce 18 Novembre, au Bibliothèque Municipale de Mirebalais, il n’y aura aucun autre héros que lui. Son recueil pour glaive, il est certain de remporter cette bataille.