Ce lundi 5 mai, par voie officielle, les résultats de la première édition du Prix Évelyne Trouillot de la Poésie ont été rendus publics. Ce prix, institué par Plimay Éditions en hommage à l’écrivaine de renom Évelyne Trouillot, entend saluer l’excellence poétique et encourager les voix émergentes du pays.
À l’issue d’un processus rigoureux de sélection ayant retenu cinq textes finalistes, le jury composé de la journaliste et écrivaine Jeanie Bogart, du poète et journaliste Adelson Elias, et de Raynaldo, poète, éditeur et enseignant, a désigné les lauréats de cette première édition. Il s’agit des jeunes poètes Geordany Fleurilus et Jephté Estiverne, respectivement premier et deuxième lauréat. Deux mentions spéciales ont par ailleurs été attribuées à Odlyne Richard pour son texte Transition, et à Jean David Désir pour Hanté.
Contactés par la rédaction, les lauréats ont exprimé, avec émotion, leur reconnaissance et leur joie. Geordany Fleurilus, déjà auteur de trois recueils de poésie, est récompensé pour son texte intitulé Précipice de paume. Le lauréat nous a livré une déclaration empreinte de sensibilité et d’introspection :
« Recevoir le Prix Évelyne Trouillot de la Poésie est pour moi une immense émotion et un honneur profond. Ce prix, qui porte le nom d’une figure majeure de la littérature haïtienne, vient reconnaître non seulement un travail, mais aussi une soif intérieure, presque inexplicable, qui m’habite depuis toujours. Il y a en moi cette sensation étrange, presque obsédante, d’être constamment assoiffé d’écriture, comme si chaque mot, chaque vers, était une gorgée nécessaire pour apaiser une faim qui ne s’éteint jamais. »
« Écrire, pour moi, ce n’est pas un choix, mais un besoin vital, une urgence. C’est aussi accepter de plonger dans l’inconnu, d’oser la rupture, la fragmentation, la déconstruction de certaines formes. » a-t-il poursuivi.
Le second lauréat, Jephté Estiverne, est une étoile montante de la scène poétique, d’ailleurs surnommé par certains le Pedri González de la poésie haïtienne. Le natif de Carrefour-Feuilles s’est lui aussi réjoui de cette reconnaissance, la deuxième de l’année après son sacre au concours de lettres organisé par le Salon du Livre de Port-au-Prince :
« Une seconde distinction pour l’année, ça fait grave plaisir. Les mots ne servent pas à grand chose pour exprimer ma joie. Je tiens également à féliciter mon frère-poète, Geordany. Il mérite amplement ce prix. Je suis témoin de ses efforts, je suis en mesure d’affirmer que ce n’est que le début pour lui. »
« Ce prix est également une bonne nouvelle pour la ville de Mirebalais en proie à des troubles liés à l’insécurité depuis plus d’un mois. Geordany en étant originaire, moi ayant de bons rapports cette ville, je peux déclarer que cette double distinction lui est entièrement dédiée. »
En attendant la publication prochaine d’une anthologie regroupant les vingt-six textes de la première sélection, nous vous offrons un avant-goût de ces voix singulières à travers un extrait des textes lauréats.
Extrait de Précipice de paume de Geordany Fleurilus :
“ …il me suffirait la mesure des paumes /
à la chaux des étreintes /
faïence pour faïence /
carreau pour carreau /
faire osciller la nuit /
sans balancer sur la mer /
le cri qui prend Gaza par la gorge… ”
Extrait de Quart de ville de Jephté Estiverne :
“… nuit d’encre
la ville saisit un linceul
y enroule ce qu’il lui reste de voix
et met le cap
sur une étoile mal naissante
quand point l’aube —
l’étoile revient sans elle
le ciel fait mine de ne rien savoir…”
Cette première édition du Prix Évelyne Trouillot de la Poésie apporte une bouffée d’air frais à la parole poétique contemporaine et nourrit l’espérance, dans un pays bouleversé et en quête de renaissance culturelle. Nous souhaitons longue vie au Prix Évelyne Trouillot de la Poésie.